Le gouvernement français vient d’autoriser le remboursement de l’Avastin, un médicament initialement utilisé contre le cancer, pour le traitement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA).
Le traitement consiste à vous transpercer les yeux avec une seringue pour vous injecter dans la rétine (fond de l’œil) un produit génétiquement modifié à partir des anticorps des souris.
Cette mesure est présentée comme une « victoire pour les patients » car le gouvernement espère économiser des dizaines ou des centaines de millions en remplaçant le Lucentis, qui est le seul médicament disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le traitement de la DMLA, mais qui coûte 30 à 50 fois plus cher que l’Avastin (800 à 900 euros l’injection).
Mais vous, quel est votre intérêt dans cette affaire ??
Et d’abord : qu’est-ce qu’un médicament comme l’Avastin, développé depuis 2004 par la firme californienne Genentech dans la lutte contre le cancer, viendrait faire au fond de votre œil ?
Le principe de l’Avastin est de bloquer la formation des vaisseaux sanguins qui irriguent les tumeurs cancéreuses. Les chercheurs espéraient ainsi freiner le développement des tumeurs en les « affamant ». En langage médical, on parle d’un produit qui bloque l’angiogenèse (d’« angio », veines, et « genèse », naissance).
Les résultats pour le cancer ont été très décevants. Par contre, les chercheurs se sont aperçus par hasard que ce produit était efficace contre la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA).
En effet, c’est en se multipliant que les vaisseaux sanguins finissent par obscurcir la rétine des personnes âgées, diminuant la vue et pouvant même les rendre aveugles. Un produit qui bloque la formation de nouveaux vaisseaux sanguins avait donc une chance de stopper la DMLA. C’est ce qui fut confirmé par les études [1].
L’Avastin aurait donc pu être proposé directement pour le traitement de la DMLA.
Mais Genentech avait un « problème ». En effet, dans le cadre du traitement du cancer, il faut injecter dans les veines du malade une grande quantité d’Avastin. Le traitement dure des mois.
Exploitant sans vergogne la détresse des malades, Genentech avait décidé de fixer le prix de l’Avastin à 10 000 dollars par mois [2]. Bien que le traitement soit pratiquement inefficace et ne fasse gagner, au mieux, que quelques mois de vie, cela restait suffisant pour générer souvent près de 100 000 dollars par patient avant qu’il ne décède ! En revanche, pour le traitement de la DMLA, seules trois injections d’une petite goutte d’Avastin sont nécessaires.
Genentech décida de fabriquer une autre molécule qui serait juste assez proche de l’Avastin pour avoir exactement le même effet. Mais aussi juste assez différente chimiquement pour justifier un autre brevet, et donc un autre prix.
C’est ainsi que naquit le Lucentis, dont le prix fut fixé à 800 euros l’injection.
De nombreux tests cliniques comparant les deux n’ont trouvé aucune différence d’efficacité dans le traitement contre la DMLA [3]. Or, la DMLA touche une personne âgée sur deux, soit 1,5 million de personnes en France.
Le Lucentis devint ainsi le médicament le plus cher pour l’assurance maladie. Il a coûté 428 millions d’euros à lui seul en 2013 [4]. Les prix pratiqués peuvent être d’autant plus délirants qu’ils sont remboursés par un système d’assurance maladie obligatoire, géré on ne sait comment par on ne sait qui.
Qu’ils le veuillent ou non, les patients sont contraints de financer des médicaments à des prix exorbitants qui d’aucune façon ne traitent l’origine des problèmes. Et le système joue en particulier avec les personnes les plus malades, les plus désespérées, qui sont prêtes à croire et endurer n’importe quoi dans l’espoir de gagner quelques semaines ou mois de vie.
Il semble en effet que plus grave et douloureuse est la maladie, plus chers sont les médicaments. Les firmes pharmaceutiques comprennent clairement que c’est au moment où les gens sont les plus vulnérables qu’il est le plus facile d’extorquer à la société un prix qui n’a pourtant rien à voir avec le service médical rendu par ces médicaments.
Pour mettre fin à cette hémorragie financière, la ministre de la Santé Marisol Touraine a pris le 20 août un arrêté ministériel autorisant l’usage de l’Avastin à la place du Lucentis.
Selon elle, l’injection d’Avastin pourrait revenir à 30 ou 50 euros, soit 20 à 30 fois moins cher que le Lucentis. Elle promet ainsi de faire économiser des centaines de millions à la Sécu.
Cela pourrait paraître courageux.
Le problème est que la ministre de la Santé fait preuve d’un tel amateurisme dans ce dossier que je crains fortement que cela ne tourne à une nouvelle déroute financière pour les assurés sociaux.
En effet :
Il faut savoir enfin que le coût du Lucentis ne représente qu’une minorité du coût du traitement de la DMLA. L’essentiel des dépenses est lié aux consultations, à l’imagerie de la rétine (tomographie de l’œil par scanographie à cohérence optique OCT), au transport des patients (dont beaucoup sont partiellement aveugles) et à la procédure d’injection intravitréenne.
Tout cela pour dire qu’il me semble que Marisol Touraine, en plein mois d’août, n’a peut-être pas pris assez de temps pour étudier son dossier.
Au bout du compte, tout cela pourrait lui exploser à la figure et représenter une facture pour les assurés sociaux bien plus lourde que le mirage de quelques économies vite acquises.
Mais au fond, que ce soit le ministère de la Santé ou les gens du laboratoire Roche, leur seule préoccupation dans ce dossier est financière.
Les uns comme les autres cherchent à grappiller des sous. Mais le ministère de la Santé agit-il vraiment dans l’intérêt des malades ?
Pas du tout à mon avis.
S’il était honnête et compétent, il parlerait des vraies solutions contre la dégénérescence maculaire liée à l’âge.
Il est tout de même stupéfiant que les autorités ne s’inquiètent pas plus d’un traitement qui, au fond, consiste à transpercer l’œil du patient avec une seringue pour lui injecter un produit aussi contestable que l’Avastin (ou le Lucentis, c’est la même chose).
Pour rappel, de nombreuses études indiquent que l’Avastin rend les tumeurs plus agressives lors des récidives [6]. Des études sur des souris ont montré que l’Avastin accélère la multiplication et l’agressivité des métastases [7]. Selon une étude de Robert Kerbel à l’Université de Toronto, les souris traitées à l’Avastin meurent dans certains cas plus vite que celles qui ne sont pas traitées du tout [8] ! Le 17 décembre 2010, la Foods and Drugs Administration (FDA), l’autorité de santé américaine, a annulé l’autorisation de l’Avastin pour le cancer du sein métastasé, après lui avoir accordé en 2008 une approbation accélérée sous prétexte que son efficacité était tout à fait remarquable (!) [9]. C’est que les effets nocifs de l’Avastin se sont révélés souvent pires que les effets bénéfiques. Aucune étude n’a montré que les femmes touchées par le cancer du sein métastasé vivaient plus longtemps grâce à l’Avastin.
Par ailleurs, l’efficacité contre la DMLA n’est pas si renversante qu’on veut bien nous le dire.
Les injections d’Avastin ou de Lucentis dans l’œil ne rendent pas une vue parfaite. Elles peuvent améliorer la vue, avec des résultats variables d’une personne à l’autre. Ces améliorations sont d’autant plus difficiles à mesurer que notre œil, même quand il fonctionne de façon optimale, voit mal notre environnement. C’est notre cerveau qui fait 90 % du travail de reconstitution des images telles qu’elles sont. La notion de vue est donc très subjective. D’ailleurs, quand on injecte aux gens souffrant de DMLA un placebo (faux médicament) à la place du Lucentis, ils sont 62 % à déclarer une amélioration au bout d’un an [10] ! Ce n’est pas autant que le médicament, mais c’est tout de même énorme. Dans tous les cas, cela reste un traitement préventif puisqu’il ne peut rien contre la DMLA une fois qu’elle est installée.
Il est donc malhonnête « d’oublier » de dire à la population que, justement, il existe des mesures faciles, peu coûteuses, sans aucun risque et naturelles de prévenir la DMLA. Et ces mesures ne nécessitent pas de vous enfoncer une seringue dans l’œil !
La pierre angulaire de la prévention de la DMLA, ce sont les antioxydants, et en particulier les antioxydants spécifiques qui se concentrent dans la rétine et qui la protègent des radicaux libres.
Selon les chercheurs, il existe même un complexe d’antioxydants qui pourrait vous empêcher de devenir aveugle en réduisant de 25 à 30 % le risque de DMLA avancé.
Il s’agit d’un mélange de lutéine, zéaxanthine, vitamine C, vitamine E, zinc et cuivre [11].
Vous les trouvez dans le jaune d’œuf et dans les fruits et légumes colorés, surtout dans les brocolis, les épinards, le maïs et les choux, les myrtilles, framboises et baies. Pour le zinc, consommez des crustacés et en particulier des huîtres.
Mais attention, les antioxydants ne suffisent pas : pour protéger vos yeux, il est essentiel d’augmenter vos apports en oméga-3, que vous trouvez dans les poissons gras, dans l’huile de colza, les graines de lins broyées et l’huile de cameline [12]. La quantité à viser est 3,4 g par jour de DHA et 1,6 g d’EPA [13] (DHA et EPA sont deux formes d’oméga-3 que l’on trouve dans le poisson). Enfin, la supplémentation en vitamine D semble diminuer l’inflammation et ralentir l’évolution de la maladie [14] : 4000 UI de vitamine D3 par jour sont recommandées de l’automne au printemps et même toute l’année si vous ne pouvez vous exposer largement au soleil. Ces éléments se trouvant rarement en quantité suffisante dans l’alimentation, la prise de compléments alimentaires est conseillée. Le mélange employé dans les grandes études sur la DMLA contenait :
À noter qu’on observe actuellement aux Etats-Unis un recul du nombre de cas de DMLA, malgré le vieillissement de la population. Ce recul pourrait être lié à la prise de ces compléments alimentaires pour la protection des yeux, compléments devenus très populaires depuis le début des années 2000 suite à la publication de l’étude AREDS dont les médias ont beaucoup parlé.
Le sujet des compléments alimentaires, largement tabou en France, est malheureusement beaucoup moins couvert par nos médias, avec en conséquence un grand déficit d’information et, osons le dire, un retard vraiment pathétique dans la connaissance des progrès de la médecine nutritionnelle.
Cela, heureusement, ne concerne pas les lecteurs fidèles de Santé Nature Innovation, du moins je l’espère.
De plus, pour préserver vos yeux, je vous recommande de faire les choses suivantes :
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
Sources de cet article :
[2] Exploiting Cancer Patients With $10,000-a-Month Drugs
[3] Medscape
[4] L’Avastin remboursé par la Sécu pour le traitement de la DMLA
[5] Medscape
[6] Cutting off cancer’s supply lines
[8] Accelerated Metastasis after Short-Term Treatment with a Potent Inhibitor of Tumor Angiogenesis
[9] FDA rejects Avastin as breast cancer therapy
[11] The Age-Related Eye Disease Study 2 (AREDS2) Research Group.Lutein + Zeaxanthin and Omega-3 Fatty Acids for Age-Related Macular DegenerationThe Age-Related Eye Disease Study 2 (AREDS2) Randomized Clinical Trial. JAMA. 2013;309(19):2005-2015. Ho L, van Leeuwen R, Witteman JC, van Duijn CM, Uitterlinden AG, Hofman A, de Jong PT, Vingerling JR, Klaver CC; Reducing the Genetic Risk of Age-Related Macular Degeneration With Dietary Antioxidants, Zinc, and {omega}-3 Fatty Acids: The Rotterdam Study. Arch Ophthalmol. 2011 Jun;129(6):758-66.
[12] Souied EH, Delcourt C, Querques G, Bassols A, Merle B, Zourdani A, Smith T, Benlian P; Nutritional AMD Treatment 2 Study Group. Oral Docosahexaenoic Acid in the Prevention of Exudative Age-Related Macular Degeneration: The Nutritional AMD Treatment 2 Study. Ophthalmology. 2013 Feb 7.
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L’avastin est à 100 euros dorénavant rien a voir avec le Lucentis , qui coûte une blinde à la Sécu ….
L’avastin m’a sauvé la vue en 2006. Il était encore à titre expérimental. Dans ça je serais devenue aveugle comme mes 2 autres soeurs qui elles n’ont pas eu cette chance de recevoir ce médicament. Alors arrêtez d’alarmer les gens.
Votre article n’est pas rassurant. Quand on est atteint d’une maladie on devrait pouvoir faire confiance aux professionnels de la santé.
L’injection du Lucentis n’est pas plus barbare que d’autres traitements pour d’autres affections.
Quand l’injection est bien faites vous ne sentez absolument rien. Après, il y a une petite gêne. İnutile d’inquiéter davantage les patients.
Atteints de DMLA, il est plus intéressant pour nous de savoir si vraiment ce traitement est efficace ou non.
Quels espoirs on peut attendre des traitements.
Je ne sais pas,J aimerais savoir, J ai eu déjà 2 injections, et ma MDLA à comencé seulement il y a. 4 mois
j,ai recu 3 injection apres avoir été opéré pour des cataractes depuis ma vision qui était point 5 de distance , et sans lunette de lecture pas besoin avant , j’ai de la difficulté a la lumiere j’ai comme une vision trouble j,ai la sensaation de porté des lentilles les yeux me font mal j,essaie de réglé avec le médical mais tous disent que il n’y a pas de probleme il y a eue erreur quelque part mais ont me ment a tour de bras je suis écoueré
Même chose. Ma vue est moins bonne depuis les piqûres mais les ophtalmos ne veulent pas l’admettre. J’ai eu comme réponse “les études ont démontré que le traitement est bon “. Si on écoutait un peu plus les patients la recherche irait plus vite.
Bonjour,
En général , j’ai suivi un traitement d’injection d’Avastin diabétique dans mes yeux .
Actuellement, j’ai utilisé deux injections, et je ne vois que la lumière floue et ondulée. Est ce que c’est normal comme ça, ou bien ça prend de temps pour que ma vision s’améliore .
Merci et bonne journée!