Je sais que la plupart d’entre vous « n’ont plus peur » des hormones : ils ont lu et compris les excellentes lettres et publications de mon confrère Thierry Hertoghe et celles que j’ai moi-même écrites sur le sujet [1].
Mais vous êtes nombreux à rester méfiants quant à la consommation de toute substance « non naturelle ».
Cette méfiance est parfaitement respectable. Quand on m’en fait part, ma réaction est toujours la même. Voici ce que je réponds aux plus sceptiques :
Cela ne suffit pas toujours à convaincre et c’est parfaitement normal.
Alors que faire ?
Rien : est-ce que l’on se résigne à accepter les dégâts causés par le vieillissement sur notre corps ?
Ou alors est-ce que l’on envisage une solution qui peut répondre aux exigences d’une santé naturelle ? Je veux parler de l’utilisation d’hormones végétales.
Attention, il est important de bien expliquer ce que sont exactement ces substances, ce que l’on peut en attendre, mais aussi quelles sont leurs limites.
Les hormones sont, par définition, sécrétées par nos glandes endocrines (surrénales, thyroïde, ovaires, testicules…) ou nos tissus.
Les hormones végétales (ou du moins l’ensemble des substances que nous qualifions ainsi) sont directement extraites d’une plante. Elles ne sont ni sécrétées, ni circulant dans notre corps. Vous comprenez pourquoi il est en réalité impropre de les appeler « hormones » : ce sont bien des « phytohormones ». Ces substances miment l’action des hormones ou en modulent l’activité [3].
On parle par exemple de « phytoestrogènes » pour des substances dont la formule est très proche de celle des œstrogènes de notre corps (et pas seulement chez la femme) et qui, de ce fait, miment leur action.
Les plus connues d’entre elles sont :
Au début de mes recherches sur le sujet, j’avais cru que des substances présentes dans certaines plantes, comme la diosgénine que contient le yam ou igname sauvage [4] pouvaient se transformer en hormones dans le corps humain. Rien finalement, tant dans mon expérience clinique personnelle que dans celle d’autres prescripteurs et surtout dans la littérature scientifique, n’a confirmé ce fait [5].
Mais cela n’empêche pas que certains effets défatigants et toniques des extraits standardisés de yam soient appréciés par certaines femmes, particulièrement en période de ménopause ou de pré-ménopause.
Pour régler définitivement cette question il faut préciser que la diosgénine est le précurseur de la progestérone, « in vitro », c’est-à-dire en laboratoire. Mais le passage de la diosgénine à la progestérone ne s’effectue pas dans notre corps. C’est d’ailleurs ce que j’explique dans ma lettre consacrée à ce sujet : les bonnes crèmes à la progestérone, dite naturelle, contiennent de la progestérone transformée en laboratoire, à partir de la diosgénine. Si elles contiennent d’autres plantes, et même de la diosgénine, c’est pour d’autres raisons que nous allons voir.
On l’a bien compris, ces substances ne se transforment pas dans notre corps en hormones. Mais elles peuvent stimuler le fonctionnement de certaines de nos glandes endocrines qui vont alors augmenter leur production d’hormones.
Cette stimulation a toutefois ses limites : elle est assez faible et diffère sensiblement d’une personne à l’autre. Tout dépend de nos paramètres spécifiques et génétiques, de notre âge, de notre équilibre métabolique et nutritionnel, etc.
N’attendez pas d’effets significatifs si vous avez certaines déficiences nutritionnelles, en particulier des déficiences en zinc. Ainsi une simple tisane de sauge ou un comprimé quotidien de yam peuvent rétablir un cycle menstruel chez l’une, alors qu’ils seront totalement inefficaces chez une autre…
Cet effet aléatoire et imprévisible des hormones végétales peut être compris comme un avantage ou un inconvénient.
Avec ces hormones végétales, il n’y a pas « d’introduction de substance étrangère à la nature ». Cela satisfait un certain nombre d’entre nous. Les notices de ces produits signalent qu’ils sont :
Ces substances sont en accès libre dans les magasins spécialisés, les pharmacies, parapharmacies ou sur le net car elles seraient, a priori, sans danger.
Cette innocuité n’est pas certaine en matière de phytoestrogènes. Le risque d’accélérer le développement d’un cancer du sein microscopique n’est pas établi de façon certaine. Il fait débat car s’il semble bien que la consommation de soja alimentaire, dès l’enfance, diminue ce risque chez les femmes asiatiques mais il y a un doute concernant la consommation de toute substance végétale contenant des phytoestrogènes chez les femmes occidentales. Cette consommation doit donc être considérée comme contre-indiquée, donc a priori à éviter, chez les enfants, les femmes enceintes ou allaitantes, ainsi que les femmes qui ont des antécédents personnels ou familiaux de cancers hormonodépendants : sein, utérus, ovaires…
Les effets sont modestes et aléatoires, ce qui n’empêche pas qu’elles conservent une place et une indication dans bon nombre de situations. Attention donc aux situations à risque concernant les cancers hormonodépendants ou les personnes ayant des antécédents familiaux !
Autre inconvénient ? La prise d’une hormone naturelle n’a aucune chance de vous faire changer de sexe.
Ne souriez pas ! C’est une question que l’on m’a posée à plusieurs reprises.
Est-ce qu’elles agissent comme des « hormone like » ? C’est comme cela que l’on appelle en anglais les substances qui se comportent comme des hormones, sans être des hormones, qui « miment » l’action des hormones.
C’est cette activité dite « hormone like », qui a permis de découvrir cette deuxième explication de l’activité des hormones végétales.
Elles agiraient en effet sur les récepteurs des cellules sensibles aux hormones. Toutes les hormones agissent en périphérie sur des « cibles » multiples. Par exemple, si les œstrogènes agissent sur les cellules des ovaires ou de l’utérus, ils agissent également sur les cellules du système nerveux, sur les parois de nos vaisseaux, ou sur nos cellules graisseuses…
De la même manière, la testostérone stimule les fonctions sexuelles, mais elle modifie aussi l’humeur en stimulant le système nerveux et en favorisant l’augmentation de la masse musculaire.
Si l’hormone représente la « clef », tous les organes « sensibles » sont porteurs d’une « serrure ». Sans la présence de cette serrure, l’hormone, quels que soient ses taux circulants, reste strictement sans effet.
Hormones et récepteurs sont des protéines dont la structure chimique et la forme spatiale sont « emboîtables » comme les pièces d’un puzzle.
Les hormones végétales naturelles peuvent donc modifier de façon significative la qualité et même la quantité de récepteurs sur les cellules cibles ce qui peut expliquer l’effet « hormono-modulateur » de ces substances.
Je confirme que les descriptions en médecine traditionnelle, notamment en médecine chinoise [6], des effets de ces fameuses substances ne sont pas le fruit de l’imagination. On retrouve ces allégations sur plusieurs continents. Prenons l’exemple, en Amérique du Sud, de la maca que l’on appelle également le ginseng péruvien.
Les habitants des hautes montagnes et vallées du Pérou disent que cette herbe est réputée pour ses remarquables propriétés toniques, et c’est pourquoi son effet sur l’organisme est comparé à l’activité céleste ou royale. Cette « herbe divine » est traditionnellement une nourriture du « yang » et, en conséquence, un symbole de virilité et d’immortalité.
Utilisée autant pour ses vertus culinaires que curatives par les Péruviens des Andes, la maca est cultivée depuis au moins 2 000 ans. Considérée comme la « nourriture de la famine », la maca devenait essentielle dans la préparation des repas en temps de disette. Or, de récentes analyses scientifiques ont démontré que sa racine possède effectivement un taux très élevé d’acides gras essentiels et que sa valeur nutritive procurerait les acides aminés indispensables à l’organisme.
En matière de médecine traditionnelle, chez les habitants des hauts plateaux du Pérou, la maca est utilisée pour des usages très variées : chez les hommes, l’accroissement de la vitalité sexuelle et également de la fertilité ; chez les femmes, lors de la ménopause, notamment pour diminuer les bouffées de chaleur et contribuer à soulager les syndromes prémenstruels.
Ce véritable composé nutritif idéal, résistant au froid extrême et permettant aux Indiens de traverser des périodes de disette, est un défatigant et un antiasthénique. La maca aurait également un effet intéressant sur la mémoire.
Ses propriétés antiasthéniques de type anabolisant ont conduit des bodybuilders à l’utiliser (avec une autre « phytohormone » : Tribulus Terrestris) comme alternative naturelle aux anabolisants stéroïdiens et aux hormones de synthèse.
Comme le ginseng, elle stimule, dans les deux sexes, la libido. C’est dans cette indication que la recommandait le docteur Gary F. Gordon, ancien président du Collège américain pour l’avancement de la Médecine :
« Après avoir entendu des rumeurs diverses à propos de cette racine, j’ai éprouvé personnellement une réponse significative dans la stimulation du tissu érectile que j’appelle alternative naturelle au Viagra ®. Je pense que la maca est un moyen de normaliser nos hormones stéroïdiennes comme la testostérone, la progestérone et les œstrogènes ».
Je crois qu’il y a une place entre les hormones « classiques » et le rejet absolu de tout conseil et de toute supplémentation hormonale. Il y a une demande du public et l’utilisation de toutes ces substances répond à de vrais besoins.
Je vais en énumérer quelques-uns ici, même si cette liste n’est pas exhaustive :
Ces substances peuvent vous rendre de grands services là ou d’autres traitements allopathiques ou homéopathiques n’avaient pas donné les résultats attendus.
Elles permettent parfois de réduire les prises ou les quantités d’autres médicaments ou d’autres hormones plus ou moins bien tolérées ou acceptées, car le « classique » traitement hormonal de substitution (THM) n’est pas toujours ni bien accepté, ni bien supporté, ni complètement efficace sur les symptômes pré- ou ménopausiques et qui empoisonnent la vie de nombreuses femmes.
Quoi qu’on en dise et quels que soient les avantages incontestables de ce traitement, les hormones n’ont pas peut-être pas livré tous leurs secrets !
Mais attention, il n’existe pas de « pilule miracle » ! Ce serait une grave erreur de croire que les hormones végétales peuvent ou doivent prendre systématiquement la place du traitement hormonal de substitution (THM) qui a fait ses preuves quant à la prévention de nombreuses affections liées au vieillissement et dont les dangers, bien que réels, restent limités s’il est correctement prescrit et suivi.
En dehors des compléments alimentaires déjà évoqués, vous trouverez ces hormones végétales dans votre alimentation :
Sous l’influence de la flore bactérienne du côlon, la daidzéine se transforme en équol, une molécule beaucoup plus active. Mais seul un tiers des femmes occidentales possède une flore intestinale capable d’effectuer cette transformation (contre 60 % en Asie). « Les probiotiques ne changent rien à cette donnée d’ordre génétique, précise, le Dr Bérengère Arnal, gynécologue et phytothérapeute [9]. Cependant, les isoflavones vont être plus ou moins bien assimilées selon l’état de notre muqueuse intestinale. C’est pourquoi je conseille de les accompagner systématiquement par un régime riche en fibres et par la prise de probiotiques, mais aussi de prébiotiques, leur carburant. »
En matière d’équilibre et d’optimisation de l’équilibre hormonal, l’alimentation diversifiée et variée avant même toute supplémentation végétale ou hormonale garde donc une place fondamentale. Je pense que c’est une des conclusions essentielles à retenir de cette lettre.
Surveillez bien votre messagerie !
Sources de cet article :
[1] J’ai écrit deux lettres sur ce sujet : « N’ayez pas peur des hormones » et « La progestérone »
[2] Les hormones bio-identiques à la ménopause: les réponses de la Dre Sylvie Demers
[3] On parle parfois de substances « hormono-mimétiques » ou « hormono-modulateurs ».
[4] Igname sauvage
[5] Malheureusement de nombreux fabricants ou distributeurs ont continué (probablement plus par désir de simplification auprès du public que par malhonnêteté caractérisée) à faire croire qu’il n’en était pas ainsi. Ce que j’ai appelé dans certaines circonstances « la guerre des yam » consistait à dire « mon yam est meilleur que le tien … car il contient plus de « diosgénine ».
[6] DIOSCOREA USED IN CHINESE MEDICINE
[7] Isoflavones (phytoestrogènes)
[8] Lignane
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Bonjour, j’ai 56 ans j’ai toujours eu un cycle régulier mais là pas de règles depuis 2 mois donc peut être la ménopause. dois je attendre un an sans règle où puis je prendre des hormones bio-identiques de suite ? La maca seule suffit-elle ? où prendre maca + hormones bio identiques . Merci de me répondre . Sophie