Un conseil simple pour ne pas devenir malade

02/02/2016
Un conseil simple pour ne pas devenir malade
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Jean-Pierre a 55 ans et il est en excellente santé.

Mais s’il cherchait, il pourrait se découvrir une bonne douzaine de maladies !

En effet, il lui arrive de s’énerver au volant ou quand ses clients le harcèlent.

Si un médecin passait à ce moment là avec un appareil pour mesurer sa pression artérielle, le diagnostic serait clair : hypertension.

Jean-Pierre mesure 1,83 m et pèse 84 kilos. Son indice de masse corporelle (IMC) est de 25,1. Un IMC « normal » varie de 20 à 24,9.

Diagnostic : surpoids.

Lorsqu’il mange certains aliments, il lui arrive de sentir une brûlure intense en bas de la poitrine, un peu au-dessus de l’estomac. Cela se produit particulièrement après le jus d’orange concentré et le cidre.

Diagnostic : reflux gastro-œsophagien.

La nuit, il lui arrive souvent de s’éveiller pour aller aux toilettes soulager sa vessie.

Diagnostic : hypertrophie bénigne de la prostate.

Le matin, quand il se lève, il se sent raide dans le dos et les jambes. Il a besoin de quelques minutes pour retrouver sa souplesse et sa mobilité.

Diagnostic : maladie dégénérative des articulations.

Il a souvent froid aux mains. Cela se produit en particulier les jours froids et pluvieux d’hiver. Quand il a neigé, il ne sort pas sans une double paire de gants. Le café aggrave son problème, mais l’alcool le soulage.

Diagnostic : maladie de Raynaud.

Il a pris l’habitude de faire une liste de ses courses et choses à accomplir, pour ne rien oublier. Il peine à se souvenir du prénom des gens. Alors qu’il est recommandé de ne jamais noter son code de carte bancaire ni son mot de passe, vous pouvez tout trouver dans un petit carnet soigneusement rangé dans son bureau.

Diagnostic : déficit cognitif léger, pré-Alzheimer

Mais tout ça n’est rien. Jean-Pierre obtiendrait encore bien d’autres résultats de maladies s’il allait voir un médecin pour faire un « check-up » complet.

Une foule de « maladies » cachées

Il suffirait à Jean-Pierre de faire des analyses de sang un peu approfondies, notamment les tests de fonction hormonale (thyroïde, hormones sexuelles) et la formule sanguine (globules rouges, globules blancs, plaquettes).

Il est pratiquement sûr d’avoir au moins une valeur anormale sur la vingtaine qui seront mesurées.

Mais là où Jean-Pierre (et sa femme) pourraient vraiment s’inquiéter, c’est s’il passait un scanner complet et une coloscopie (caméra introduite par le rectum pour inspecter la paroi interne de l’intestin).

Nodules dans le poumon, kyste du rein, polypes dans le côlon (gros intestin), cellules cancéreuses dans la prostate, hernies et anomalies osseuses diverses, il est presque sûr qu’on lui découvrirait plusieurs signes suspects – et inquiétants.

Diagnostiquer une maladie n’implique aucune amélioration pour le patient

On imagine souvent qu’il est avantageux de se faire diagnostiquer les maladies le plus tôt possible, car il sera alors plus facile de les guérir.

Ce n’est pourtant pas du tout prouvé sur le plan médical.

Dans tous les cas cités ci-dessus, le fait que Jean-Pierre s’aperçoive qu’il a une « anomalie » suite à un examen médical ne permettra absolument pas d’empêcher qu’elle évolue.

Prendre des médicaments ou subir des opérations ne fera, selon toute probabilité, que lui faire courir des risques inutiles.

Si Jean-Pierre se sent en bonne santé, l’important pour lui est de continuer à profiter de la vie sans chercher à se créer des ennuis.

Et de toute façon, il n’y a pas d’autre moyen d’empêcher une évolution défavorable que de suivre un mode de vie sain, par exemple tel que celui que je recommande jour après jour dans cette lettre.

Malade ou en bonne santé, ce mode de vie sain est recommandé pour toutes les personnes qui souhaitent éviter les ennuis et aller mieux.

 

Des moyens d’investigation trop puissants

Chaque année qui passe, scanners et IRM deviennent plus puissants et les examens plus répandus.
Les nouveaux scanners permettent de visualiser des tranches de votre corps d’un millimètre d’épaisseur. Cela veut dire que, sur la longueur qui va de votre tronc jusqu’en haut de votre tête (soit 80 cm environ), on peut faire 800 photos de tranches. Les images peuvent ensuite être agrandies des centaines de fois pour visualiser la moindre anomalie.
Le corps humain n’est pas un produit industriel standardisé. C’est un organisme vivant d’une extrême complexité. La plupart d’entre nous vivons sans le savoir avec des organes ou des choses dans notre corps qui sont « un peu trop » ceci, ou « pas assez » cela.
Aller mesurer le moindre organe au scanner est le meilleur moyen de vous causer des angoisses inutiles.
Mais cela fait les affaires de certains.

À force de chercher, tout le monde est malade

L’étude de la Cleveland Clinic faite par les pathologistes de Détroit (USA) dans les années 80 au sujet de la prostate [1], a révélé que vous découvrirez un « cancer de la prostate » chez 45 % des hommes de 50 à 59 ans si vous allez fouiller dans leur prostate avec une aiguille (un examen appelé biopsie).
La proportion d’hommes prétendument atteints du cancer de la prostate monte à 68 % chez les hommes de 60 à 69 ans et 82 % chez ceux âgés de 70 à 79 ans.
Même parmi les hommes entre 20 et 30 ans, près de 10 % ont déjà un « cancer de la prostate ».
Cela veut-il dire qu’il faille s’inquiéter, opérer ? Absolument pas. L’important est de laisser ces hommes tranquilles. On envisagera d’agir uniquement le jour où le cancer de la prostate se manifestera par des signes extérieurs gênants.
En effet, on sait maintenant que de nombreux cancers sont non progressifs.
C’est le cas en particulier du cancer de la prostate :

  • Certains cancers s’atrophient (se réduisent) parce qu’ils dépassent la capacité d’apport sanguin des vaisseaux qui les irriguent
  • D’autres sont repérés par le système immunitaire de l’hôte qui parvient à les détruire
  • D’autres encore ne sont pas agressifs et stagnent jusqu’à la mort du patient (par une autre cause)
  • D’autres enfin évoluent si lentement que, de la même façon, le patient souffrira et mourra d’une autre maladie avant que la taille de son cancer ne soit devenue gênante.

Il existe de nombreuses causes biologiques expliquant l’absence d’évolution négative d’un cancer, que les scientifiques sont en train de découvrir actuellement [2].
Et c’est vrai de bien d’autres « maladies » qui n’en sont pas réellement.
D’innombrables personnes ont des douleurs occasionnelles dans le ventre. Si vous leur faites une échographie, vous trouverez souvent des calculs biliaires. Ces calculs sont-ils pour autant la cause des douleurs ? C’est très difficile à dire. Parmi les gens qui n’ont jamais mal au ventre, vous trouverez presque autant de calculs biliaires si vous faites l’examen.
De même, beaucoup de gens ont mal au dos ou aux genoux. Faites un IRM (résonance magnétique) et vous avez de grandes chances de trouver des lésions du cartilage, ou des disques déplacés ou qui sortent de l’axe (hernie discale).
Mais la plupart de ces anomalies ne sont pas la cause des douleurs. Là aussi, de nombreuses personnes qui n’ont ni mal au genou ni mal au dos ont malgré tout des lésions du cartilage ou des hernies.
Si vous explorez en détail le système vasculaire d’une personne cardiaque, vous trouverez très vraisemblablement de petits anévrismes, thrombophlébites, embolies dans l’aorte, les jambes, les poumons…
Faut-il prendre des médicaments ou opérer ? Une fois que vous avez fait la « trouvaille », il est très difficile au patient comme au médecin de se décider.

Une tentation presque irrésistible de « faire quelque chose »

Mais une chose est sûre : si l’on ne fait rien et que le problème évolue mal, le médecin s’expose à en éprouver les plus graves remords, et subira peut-être des poursuites judiciaires, voire une sanction de l’Ordre des médecins.
De son côté, le patient vivra avec l’angoisse d’une « épée de Damoclès » sur sa tête.
Par « sécurité », l’un comme l’autre préféreront en général intervenir si c’est possible. Au minimum, ils voudront faire des examens supplémentaires qui, à leur tour, augmenteront le risque de découvrir d’autres problèmes de santé qui avaient été ignorés jusque là.
C’est un cercle infernal qui explique largement l’augmentation prodigieuse de la taille de nos hôpitaux, des queues aux urgences, des dépenses de santé, et de la proportion de personnes qui prennent des médicaments tous les jours et qui se considèrent comme « malades ».

Attendre d’être malade avant d’aller consulter

Selon le Dr H. Gilbert Welch, expert de notoriété internationale sur le dépistage et professseur au Dartmouth Institute for Health Policy and Clinical Practice (USA) :

« Autrefois, les gens ne consultaient le médecin que quand ils ne se portaient pas bien. Ils attendaient de souffrir de symptômes.
Mais le paradigme a changé. Le diagnostic précoce est devenu l’objectif du système de santé.
La sagesse populaire estime que plus de diagnostics précoces entraînent de meilleurs soins.
Cela peut être vrai pour certains. Mais il y a un revers à la médaille : trop de diagnostics peuvent littéralement rendre malades les bien-portants. Ces nombreux diagnostics déclenchent plus de traitements, et des traitements pour des problèmes qui ne sont pas si graves ou, pire, qui ne le sont pas du tout. En revanche, les traitements inutiles peuvent faire du tort, et être pires que la maladie.(…)
Le diagnostic précoce est devenu synonyme de médecine préventive. La médecine préventive est vue intrinsèquement bonne, ce qui fait que la détection précoce ne peut qu’être bonne. Mais en fait, le diagnostic précoce n’a rien à voir avec la prévention puisque son seul objectif est de trouver des maladies et non de les prévenir. Il vise à trouver des anomalies au début de leur évolution de manière à en prévenir les conséquences. Mais beaucoup d’anomalies ne porteront jamais à conséquences. » [3]

Le diagnostic précoce débouche donc sur la création de millions de personnes qui s’imaginent malades, qui subissent des batteries d’examens, et souvent des interventions ou médications inutiles.
Le Dr H. Gilbert Welch ajoute :

« La vraie prévention est ce que grand-mère me disait quand j’étais petit : ne fume pas, mange ta soupe et tes légumes verts, et va jouer dehors (avec le message subliminal : fais de l’exercice et débarrasse-toi de tes tensions). Son idée était simple : vivre sainement. »

On ne saurait mieux dire.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis

 

Sources de cet article :

[1] W. A. Sakr, D. J. Grignon, G. P. Hass et collab., « Age and Racial Distribution of Prostatic Intraepithelial Neoplasia », European Urology, 30 (1996) : 138-144.

[2] W. J. Mooi et D. S. Peeper, « Oncogene-induced Cell Senescence – Halting ont the Road to Cancer », New England Journal of Medicine, 355 (2006) : 1037-1046 ; J. Folkman et R. Kalluri, « Cancer without Disease », Nature, 427 (2004) : 787 ; M. Serrano, « Cancer Regression by Senescence

[3] H. Gilbert Welch, « Overdiagnosed : Making People Sick in the Pursuit of Health », janvier 2012.

 

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goujon
goujon
6 années plus tôt

je suis tout à fait d’accord avec vous, trop de prévention peut vous rendre plus malade qu’avant car le point de vue psychologique n’est jamais pris en compte par les médecins, on vous assassine avec des mots et autres jargons medicaux

Elisabeth
Elisabeth
6 années plus tôt

Je fais parti de ces personnes qui préfère ignorer la maladie et refuse de prendre les médicaments prescrit par les spécialistes. un exemple récent, depuis 6 ans j’ai une tension qui augmente la dernière est de 188/7, oui c’est grave et j’ai eu plusieurs malaises, mais je refusais de prendre quoique ce soit, car dans mon esprit ce problème n’était pas dû à mon alimentation ni à ma façon de vivre, mais ce que je vivais. Depuis 15 années j’avais constaté qu’un de mes enfants présentait des troubles TDAH et tous les médecins que j’ai vu m’ont pris de haut… Lire la suite »

estelle
estelle
6 années plus tôt

On ne peut être d’accord avec cette caricature de la médecine préventive et notamment du check-up. Cela ne se passe pas du tout comme cela dans deux hôpitaux que je connais : Pompidou à Paris et l’hôpital américain de Neuilly. Mon père de 83 ans a fait un check-up en juin dernier à l’hôpital américain et après que le médecin référent lui ait dit que tout était normal, il est reparti avec une simple recommandation nutritionnelle intelligente pour soulager un foie un peu fatigué. Il est évident que la détection précoce de la plupart des tumeurs sauve des vies. Ce… Lire la suite »

Pierre-Ami Béguin,
Pierre-Ami Béguin,
6 années plus tôt

Merci de dire ouvertement , ce que j’observe aussi en tant que médecin et acuponcteur en Suisse. Une Hypertrophie des examens , scanner IRM, et chaque petite tache demande des examens ou des operations supplémentaire. souvent ces maladies n’auraient jamais été vue. La peur de manquer un diagnostic est tellement grande chez les médecin hospitaliers, que la simple écoute, palpation et auscultation traditionnelle ne suffit plus. La médecine chinoise connait , le flux du Qi, énergie vitale, inconnu de la médecine occidentale universitaire, Là ou il y a une douleurs, leflux de Qi est bloqué, ou un excès en amont… Lire la suite »

philippe faucheux
philippe faucheux
6 années plus tôt

En 2006, ma compagne a détecté une boule dans ma jambe. L’échographie a mesuré 5,5cm de diamètre. Un an après le scanner mesurait 6,5cm (ce qui fait 40% de matière en plus) et révélait que ce n’était pas de la graisse et que ce n’était pas relié au vaisseaux sanguins. Le problème était que ça pourrait finir par comprimer l’artère fémorale. Je décide de ne rien faire, même pas de biopsie qui risquerait d’énerver ces cellules; Bien m’en a pris puisque 6 mois plus tard, il n’y avait que 1 ou 2 mm de plus (+ 10 % de volume,… Lire la suite »

SIDI Hachemi
SIDI Hachemi
6 années plus tôt

Jean Marc Dupuis dit, je cite ” Le diagnostic précoce n’a rien à voir avec la prévention puisque son seul objectif est de trouver des maladies et non de les prévenir.” Je dirais plus, la seule prévention est dans son assiette. Manger sainement en limitant au max aliments sucrés et les viandes rouges et faire un peu d’exercice physique.

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