Je parle beaucoup dans mes lettres de l’hygiène du corps : nutrition, vitamines, médicaments, exercice physique…
Mais la réalité est que, pour maximiser nos années de vie en bonne santé, surveiller l’hygiène de notre esprit est primordial.
L’expression « hygiène de l’esprit » peut sembler curieuse, mais donnez-moi une chance de m’expliquer, vous qui faites déjà preuve de tant de bienveillance (et de patience) en lisant fidèlement cette lettre d’information santé.
L’hygiène de l’esprit, c’est faire attention à ne pas se pourrir le cerveau avec des images, des bruits, des idées violentes et négatives.
Car notre corps et notre esprit sont beaucoup plus imbriqués qu’on ne l’imagine. À tel point qu’une personne qui vit dans le stress, la contrariété, les conflits et les émotions désagréables, est quasiment sûre de perdre des années, voire des dizaines d’années de vie en bonne santé [1].
Les raisons sont multiples et nous n’en aborderons qu’une aujourd’hui : l’influence de vos émotions sur vos globules blancs, votre première ligne de défense immunitaire.
À l’école, nous avons appris que nous possédions d’une part un système nerveux, d’autre part un système immunitaire (défenses naturelles), chacun fonctionnant de son côté.
C’était simple : pour gérer nos émotions et nos sensations, nous produisions des courants électriques le long de nos nerfs et dans nos neurones, et nous fabriquions des substances appelées neurotransmetteurs (par exemple la dopamine, la sérotonine, les endorphines) qui nous donnaient des bouffées de plaisir, de stress, ou calmaient nos douleurs…
Parallèlement, pour contrer les infections, nos globules blancs dans notre sang partaient à l’attaque des bactéries, virus qui s’introduisent dans notre organisme, ainsi que de nos cellules malades (cellules cancéreuses), et nous débarrassaient de nos cellules mortes.
Nous pouvions donc mener notre petite vie sans nous préoccuper, soutenus d’un côté par un système nerveux qui gérait les événements de notre vie, et de l’autre côté une armée de globules aussi efficaces que discrets, qui combattaient nos infections automatiquement, sans même demander de salaire.
Mais cette vision simpliste a été remise en cause dès les années 1970 par les travaux de Robert Aden et Nicolas Cohen [2].
Robert Aden et Nicolas Cohen ont découvert que les neurotransmetteurs produits par notre système nerveux, et qui provoquent nos réactions émotives, sont en fait reconnus par nos globules blancs. Nos globules blancs portent à leur surface des récepteurs pour les neurotransmetteurs produits par le cerveau.
De plus, ils se sont aperçus que nos tissus qui fabriquent nos globules blancs (rate, thymus, moelle osseuse) bénéficient, contrairement à ce que l’on pensait, d’une innervation exceptionnellement riche.
Cela signifie que notre centre nerveux (cerveau et moelle épinière) assure un contrôle direct et très étroit de la production de nos globules blancs, qui n’opèrent donc nullement en autonomie par rapport à notre esprit et nos pensées.
Symétriquement, les cytokines (messagers du système immunitaire) produites par nos globules blancs pour lutter contre les infections sont reconnues par notre système nerveux. Nos globules blancs ont donc une influence sur notre cerveau, par l’intermédiaire des cytokines.
Selon le Dr Thierry Janssen, les cytokines déclenchent « les changements d’humeur, les perturbations du sommeil et les modifications des habitudes alimentaires dont nous faisons l’expérience chaque fois que nous sommes grippés, transpirant au fond de notre lit, l’appétit coupé et le moral au plus bas – le repli sur soi étant une adaptation normale du cerveau à la maladie.[3] »
Enfin, des travaux plus récents vont encore plus loin : selon Candance Pert, professeur à l’université de Georgetown (USA), les molécules qui servent à la communication entre nos neurones (neuropeptides) agissent non seulement sur nos cellules immunitaires, mais également sur nos cellules digestives et vasculaires [4]. Ce qui explique l’influence non seulement de nos émotions, mais également de nos simples pensées, sur notre digestion et notre pression sanguine notamment.
Une imbrication aussi étroite entre notre système nerveux et notre système immunitaire a des conséquences pratiques gigantesques.
Une étude de l’American Journal of Psychiatry avait déjà mentionné en 2000 le fait que, en cas d’infection grave ou de cancer, les cytokines produites pour lutter contre la maladie peuvent influencer le cerveau en déclenchant des dépressions majeures, de la schizophrénie et la maladie d’Alzheimer [1].
On sait également – et c’est beaucoup plus classique – qu’éprouver des sentiments négatifs déclenche de la sécrétion d’adrénaline et de cortisol (hormone du stress).
Or l’adrénaline augmente la pression artérielle et le flux sanguin, ce qui endommage la paroi interne des artères. Ainsi que nous l’avons vu hier, ces petits trous sont alors bouchés par du cholestérol, et des plaques d’athéromes commencent à se former, augmentant le risque d’infarctus et d’AVC.
D’autre part, le cortisol, qui est très anti-inflammatoire, provoque une atrophie des organes lymphoïdes, c’est-à-dire qui produisent des globules blancs. Si le stress est durable, les cellules immunitaires deviennent insensibles au cortisol et, lorsque le processus de fabrication du cortisol s’épuise et que le taux diminue, se produit un emballement des réactions immunitaires.
C’est alors un facteur déclenchant, ou tout au moins aggravant, de maladies dites « auto-immunes » [5]. Les réactions inflammatoires peuvent aussi être responsables de maladies du foie, des intestins, et des articulations (hépatite, maladie de Crohn, rectocolite ulcéro-hémorragique, maladies rhumastimales invalidantes [6].
Heureusement, si les émotions négatives sont dévastatrices, les émotions positives, elles, sont extrêmement bénéfiques.
Selon les travaux de Richard Davidson, du laboratoire de neurosciences de l’université du Wisconsin, c’est le cerveau gauche, siège des émotions positives, qui gère l’immunité cellulaire. Adopter une attitude positive augmenterait la réaction immunitaire [7].
Ce fait semble être confirmé par les travaux de John Gruzelier à l’université de Westminster, à Londres, qui a enregistré l’activité cérébrale de patients infectés par le virus du sida.
Son étude a montré que les patients dont l’activité cérébrale était plus importante dans l’hémisphère gauche avaient un meilleur moral, maintenaient plus longtemps leur immunité cellulaire et connaissaient une progression plus lente de la maladie [8].
Dans la pratique médicale, le Dr Thierry Janssen témoigne qu’il encourage ses patients à « renforcer leurs défenses immunitaires en choisissant de se faire plaisir. [9] »
On aura compris évidemment que « se faire plaisir », dans ce contexte, ne signifie pas aller au cinéma regarder un bon film d’horreur, ni s’engager dans aucune activité qui risquerait de nous causer des ennuis ou des conflits avec les autres, puisque c’est exactement le type de situation qui nous causerait les émotions qu’il faut éviter.
S’il est courant que les thérapeutes actuels recommandent des pratiques de relaxation inspirées des philosophies orientales, il faut noter que le simple fait de respirer une bonne odeur (celle du chocolat) a été associé à une hausse des sécrétions des immunoglobines IgA, un anticorps, alors que les personnes qui respiraient une odeur de viande pourrie ont des taux d’IgA diminués [10].
Ecouter de la musique harmonieuse, se promener dans de beaux paysages, contempler de beaux monuments et œuvres d’art, parler avec un ami, lire de la littérature décrivant avec élégance de grandes aventures humaines et de grandes pensées, susceptibles d’entraîner notre admiration et de susciter notre enthousiasme, réaliser soi-même une chose dont on soit fier, préparer un bon repas, sont autant de moyens de favoriser des pensées positives.
Et en plus de nous rendre heureux, c’est le meilleur moyen de permettre à notre corps, lui aussi, de rester jeune, en bonne santé, et de guérir.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
Sources de cet article :
Le plus beau cadeau fait aux autres… et à nous-mêmes Chère lectrice, cher lecteur, Le stress, les angoisses, sont en train ...
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Bonjour, il est vrai que l’humeur agit sur le corps, et plus l’on est heureux, plus l’on peut vivre en bonne santé, et réciproquement. une petite remarque concernant le cerveau gauche qui est censé régir les émotions positives “Selon les travaux de Richard Davidson, du laboratoire de neurosciences de l’université du Wisconsin, c’est le cerveau gauche, siège des émotions positives, qui gère l’immunité cellulaire” d’après Hughes Duffau, la règle de la partie droite ou gauche du cerveau est une théorie complètement fausse. je vous joins l’excellent article : http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/hugues-duffau-le-cerveau-se-repare-lui-meme_1578825.html extrait: “Et l’idée bien ancrée selon laquelle notre cerveau droit serait… Lire la suite »
Très bon article comme d’habitude. Un seul point oublié à mon avis : Le facteur social. Je m’explique, si vous faites un métier passionnant pas de problème, si votre travail est subi et baigné dans un environnement hostile…bonjour les dégâts. Une balade en forêt avec le chant des oiseaux ni fera rien. Un travail stressant n’est JAMAIS pris en compte dans les facteurs de pénibilité, et pourtant ! Il est subi en permanence et cause des dégâts énormes et bien sûr des pensées négatives permanentes. Les mêmes que celles dont vous parlez. Bonne année 2015 et plein de pensées positives…si… Lire la suite »
Bonjour Monsieur Dupuis. Article très intéressant, comme d’habitude. Pour celles et ceux qui ont perdu l’odorat, que préconisez-vous? Voud allez me dire que les mauvaises odeurs n’ont aucune influence négative sur elles/eux, mais…?
Merci d’avance.
Bonne journée et tous mes meilleurs voeux pour une heureuse nouvelle année!
Annie K.
Dans cette lettre comme dans le mensuel Bien-ëtre santé,il est évoqué l’importance de l’esprit sur le corps,c’est un principe fondamental et trop souvent ignoré.Je vous encourage donc à persévérer dans cette information,ce domaine est la vraie médecine et le meilleur médicament.A évoquer aussi l’énergie du corps en complément.Le dernier numéro du mensuel BES est aussi très riche en informations de qualité.Poursuivre ,Merci
Tellement juste et vrai !!!
Bonjour à vous ! Je m’interroge quand même sur tous ces centenaires qui ont vécu souvent, les deux guerres mondiales, les privations, l’Occupation allemande, la mort de maris, enfants, les camps de concentration parfois… Quoi de pire que d’avoir vécu en temps de guerre? Alors oui, on sait que le mental influence le physique, mais je pense aussi que d’autres facteurs entrent en jeu dans la longévité actuelle. 1) la capacité de résilience face à l’adversité, faisant l’objet d’un livre de Boris Cyrulnik – je pense que nos générations actuelles n’ont plus cette capacité de résilience comme nos aînés qui… Lire la suite »