Le vendredi 8 mars, on pleurait la mort de Kelly Catlin.
Cette Américaine de 23 ans s’est suicidée alors qu’elle était :
Elle était, de plus, entourée d’une famille aimante, et notamment d’un frère et d’une sœur triplés, et apprenait le chinois.
Que s’est-il produit, alors, pour qu’elle décide de mettre fin à ses jours, à un âge si jeune, avec une vie si riche et tous ses talents ?
Dans les journaux, on explique que Kelly avait « une vie trop parfaite », mais aussi trop remplie de défis qu’elle n’arrivait plus à gérer [1].
Sa famille précise que Kelly était devenue dépressive après une commotion cérébrale l’an passé [2].
Ces explications sont crédibles, mais peut-être incomplètes.
Il est vrai que les commotions cérébrales (chocs violents à la tête) peuvent abîmer la « matière blanche » du cerveau, dans une zone associée aux « circuits de récompense », et ainsi provoquer anxiété et dépression.
Les footballeurs professionnels et les boxeurs, qui subissent des coups répétés à la tête, en souffrent souvent. Une étude de l’université de Pittsburgh, parue en 2015, a montré que l’on pouvait observer ces lésions à l’IRM [3].
Mais aucune étude n’indique que cela suffise à pousser quelqu’un au suicide, surtout à un âge jeune.
Concernant l’argument de la « vie trop parfaite » et les difficultés à gérer des obligations trop nombreuses, cela pose la question de savoir pourquoi cette jeune femme avait besoin d’en faire autant.
Sans doute ne connaîtrons-nous jamais son mystère. Mais manifestement ces médailles, ces diplômes, ces triomphes, ne lui ont pas suffi.
C’est qu’il lui manquait autre chose, de plus important que tout cela.
Nous avons tous connu des personnes autour de nous qui cherchaient à se dépasser.
Ce n’est pas mauvais en soi, mais toute quête de performance extrême demande de se poser la question : « Dans quel but faisons-nous cela ? Se pourrait-il que ce dépassement de soi soit une nécessité, par exemple pour combler un manque, un vide, une angoisse ? »
J’ai eu la puce à l’oreille en regardant des photos de Kelly sur Internet. Chaque fois, j’ai ressenti une douleur, une tristesse indicible.
Elle était sur des podiums, mais, au lieu de triompher, elle paraissait ailleurs. Pas de sourire franc, mais un regard interrogateur, rempli de doute et d’un douloureux « pourquoi ? ».
Avec un peu d’imagination, on pouvait la croire au bord des larmes.
La voici, par exemple, lors d’un de ses plus grands triomphes sportifs :
Peut-être que son accident à la tête a été la conséquence, et non la cause, de son mal-être. Si elle tirait si fort sur la corde, c’était peut-être… pour la rompre.
Ainsi, il en va de beaucoup de sportifs de l’extrême qui trouvent dans les exploits une échappatoire, malheureusement provisoire.
Mais nous, les gens « normaux » (si l’on peut dire), nous n’échappons pas forcément à ce mal.
En remplissant nos agendas à ras bord… en consultant nos smartphones dix fois, cinquante fois, cent fois par jour… en travaillant comme des forcenés… en éprouvant le besoin de partir en week-end, sur la route, dans les embouteillages, à tout bout de champ… en perdant peu à peu la capacité à nous arrêter, à rester seul, à lire tranquillement ou à écouter une musique assis dans un fauteuil, sans rien faire d’autre…
En tombant dans la frénésie consommatrice des supermarchés, du shopping, des sites de vente sur Internet, qui peuvent nous absorber pendant des heures…
En oubliant peu à peu de faire silence en nous, longuement, et régulièrement…
N’est-ce pas, au fond, la même fuite, la même tentative désespérée de combler un vide, une angoisse, d’échapper à une peur qui nous poursuit ?
C’est l’occasion de relire ce petit poème que l’on m’a envoyé l’autre jour :
Ce que l’on réprime, s’imprime
Ce à quoi on résiste, persiste
Ce que l’on fuit, nous poursuit
Mais ce à quoi on fait face… s’efface.
Tant il est vrai que la solution n’est pas la fuite en avant, d’essayer de faire toujours plus, toujours mieux.
C’est au contraire de s’arrêter, de faire face à cette angoisse, de l’examiner, de lui parler.
En parler aussi, avec un ami ou une personne bienveillante. L’analyser, l’apprivoiser. Sans chercher à l’éliminer forcément de notre vie. Mais faire en sorte de la connaître pour pouvoir vivre avec elle. Et ainsi lui faire perdre son caractère menaçant et oppressant.
L’empêcher de nous pousser dans les extrêmes. De nous pousser au désespoir. L’empêcher de faire de nous son esclave.
Et ainsi redevenir maître chez soi. Reprendre les commandes de notre propre vie. Pour aller où nous avons décidé d’aller, et non plus là où elle a décidé de nous pousser.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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J’ai lu avec attention l’histoire de Kelly et cela m’a tout de suite fait penser à un documentaire que j’avais vu sur les dangers des médicaments psychiatriques. L’article ne dit pas que Kelly prenait des médicaments, mais c’est le remède habituel fourni aux personnes qui souffrent de dépression. Ce document s’appelle “Erreur fatales, Les drogues psychiatriques peuvent tuer votre enfant”. Ce sont des témoignages de parents qui ont soufferts de la disparition de leur enfant pour cette raison. De plus, une maman raconte son enquête et ce qu’elle a trouvé à ce sujet. Très édifiant!!! Ce documentaire se trouve sur… Lire la suite »
Merci pour ce très beau poème je lai copié et mis tout près de mon ordinateur, quel beau message à lire et relire souvent…
Jo.
du Québec qui vous lit régulièrement.
Merci Jean Marc!
Bonjour-Je rejoins “Goujon” : Il se pourrait qu’elle n’ait pas eu une vie sentimentale lui apportant L’ESSENTIEL..
Et si, par ailleurs, elle n’était pas soutenue par une foi religieuse assez forte, sa vie était bien vide ! Pauvre gosse !
Analyse très pertinente….
Difficile d’échapper à ce mal être et cette insatisfaction chroniques dans un monde qui prône le matérialisme et l’égocentrisme…
L’être humain a besoin, pour être heureux, d’autres choses que des trophées ou une voiture de sport….
À l’imâge d’un tabouret, il nous faut au moins trois pieds pour tenir debout ; combler nos besoins physiques, affectifs et spirituels !!!
C’est comme ça, c’est dans nos gênes…
Bonne journée à tous et gardons le sourire
Tu as mis le doigt dessus!!!
L’équilibre, nos besoins physiques,affectifs et Spirituels.
Notre vie est vide de sens s’en notre Créateur Dieu Jehovah.
Que l’on se le dise. Bye bonne journée.
Mes sympathies, à toute la famille et amis.
Quelle tristesse, une fille si jeune et pleine de vie.
Je suis de tout coeur avec vous, mes prières vous accompagnent.
La consolation ,vous allez la revoir au Paradis.
Sincèrement une lectrice.
Merci pour cet article et ce petit poème. Vous avez touché là un sujet très sensible et ce que vous dites est tellement vrai. A faire circuler largement.
Je reste persuadé qu’il faut rechercher le mal-être (être mal) de Kelly dans son “histoire existentielle” son passé et son passé proche, pour décrypter son présent et comprendre ses croyances. Oui, il est aujourd’hui possible de combattre les états dépressifs par des protocoles adaptés, chaque cas étant une légende différente.