Pour la troisième fois de la semaine, vous vous réveillez en sursaut.
Angoisse. Quelle heure est-il ?
Non ! Une fois encore, quatre heures du matin !!
Nous sommes tous passés par des phases de notre vie où nous nous sommes réveillés chaque nuit entre 3 h et 5 h du matin.
Si vous êtes comme moi, vous avez essayé la valériane, la mélatonine, l’huile essentielle de lavande, arrêté le café… Mais quelle que soit la méthode, vous avez agi à l’encontre de siècles d’expérience !
L’historien Roger Ekirch a publié en 2006 un livre contenant plus de 500 comptes rendus écrits à travers les âges sur le premier sommeil et le second sommeil.
Journaux intimes, revues médicales, livres de prières : tous évoquent des approches du sommeil très différentes de ce que nous considérons aujourd’hui comme « normal ».
Il semble que les gens aient eu l’habitude de dormir la première partie de la nuit, de se réveiller quelques heures au petit matin, puis de compléter leur repos jusqu’au moment de démarrer la journée sérieusement.
Les travaux de Roger Ekirch sont appuyés par des scientifiques qui ont constaté que notre corps revient naturellement à cette façon de dormir quand on supprime les stimulations artificielles (la lumière électrique, par exemple).
Dans cette période entre le premier et le second sommeil, les gens ravivaient le feu, faisaient un tour de garde, mangeaient quelque chose, nourrissaient les bébés, se racontaient des histoires ou faisaient l’amour.
On pense que c’est à cause de cela que tant de contes anciens font intervenir des personnages nocturnes, telles la chouette qui hulule, la « reine de la nuit », la sorcière sur son balai, la lune avec ses yeux et sa bouche…
Nous avons perdu tout souvenir de cette façon de dormir, à tel point que le réveil à 4 h du matin nous provoque un accès d’anxiété incroyable, et complètement inutile.
Au lieu de mettre à profit ce temps idéal, dans le calme et l’obscurité de la nuit, pour réfléchir, imaginer, créer (car notre cerveau est particulièrement alerte à ce moment-là), nous paniquons.
Si bien que, au lieu de mettre ce précieux moment à profit, nous le transformons en cauchemar.
Nous retournons cette énergie cérébrale contre nous-mêmes, pour nous fabriquer des angoisses, imaginer toutes sortes de dangers et de catastrophes qui disparaîtront comme par enchantement avec la lumière du jour.
Ainsi, c’est à quatre heures du matin que nous nous inquiétons le plus de la baisse de productivité de la journée. Nous voyons tous les événements de notre vie notre mariage, notre travail, nos amitiés, notre famille, notre santé sous l’aspect le plus sombre.
Or, il semble qu’il y ait de bonnes raisons de croire que le cerveau explore de nouvelles pistes, la nuit.
Quand nous tombons endormis, nous fabriquons de la prolactine, une hormone qui nous met dans un état de relaxation, de rêve et de sommeil.
Nous sécrétons aussi de la prolactine quand nous nous réveillons et restons bien détendus.
C’est pourquoi, si nous ne sommes pas assaillis par des idées noires, les moments où nous « paressons » au lit le matin peuvent être si agréables.
Quand on se réveille la nuit, ces hormones nous permettent de combiner notre capacité à rêver, donc à imaginer, à inventer des choses sans contraintes, et nos facultés intellectuelles conscientes.
C’est donc un moment d’hypercréativité à exploiter au mieux, mais qui se retourne facilement contre vous parce que c’est à ce moment-là que vous risquez le plus d’imaginer que cette tache dans votre dos est probablement un mélanome.
Si vous lisez mes lettres depuis longtemps, vous savez que je recommande de ne pas rester au lit à partir du moment où vous avez constaté que vous étiez réveillé.
Je ne suis sans doute pas le seul à vous l’avoir conseillé. Votre médecin, des amis, vous ont forcément invité à aller manger quelque chose à la cuisine, à lire un livre dans un bon fauteuil, avec une lumière tamisée, à écouter de la musique douce, à faire un puzzle, du tricot, à boire une tisane ou une tasse de chocolat chaud…
Cela peut sembler contre-productif, mais, là encore, c’est l’expérience qui parle. Se mettre en action tranquillement, sans activité trop excitante, est la meilleure façon d’être repris par le sommeil. La difficulté est d’oublier de guetter le sommeil, et de parvenir à faire son ouvrage en laissant vagabonder ses pensées en toute relaxation.
Soudain, le sommeil revient et il vous suffit alors de vous coucher pour vous rendormir. Vous repartez pour 45 minutes de sommeil minimum, de préférence 1 h 30 ou 2 h, qui au bout du compte vous apporteront le repos nécessaire pour passer une bonne journée.
Évidemment, le problème est qu’on est très tenté, aujourd’hui, d’allumer une forte lumière électrique, voire un smartphone, un écran d’ordinateur ou une télévision.
Autrefois, les gens restaient dans l’obscurité.
La seule lumière qu’ils avaient était celle de quelques braises, d’un feu, d’une chandelle tremblotante, du clair de lune… Tout cela facilitait grandement le rendormissement.
Si vous devez absolument vous éclairer, allumez une petite lampe de chevet ou une veilleuse, sans quoi vous risquez de briser votre rythme circadien (rythme jour/nuit)
De plus, ce sommeil fractionné en deux s’intègre mal dans le mode de vie moderne, où on se couche tard (après le film) et où on se lève tôt pour partir au travail.
Seules les personnes qui bénéficient d’horaires de travail flexibles peuvent vraiment s’adapter à cette façon de dormir en toute décontraction, sans paniquer à l’idée de n’avoir pas assez dormi, ce qui est, bien sûr, le moyen le plus sûr de rester éveillé.
L’espoir est que notre société, orientée vers la productivité, redécouvre les vertus des rythmes de vie naturels, et qu’elle ait l’intelligence de s’adapter car, en effet, avec un bon sommeil naturel, on est incroyablement plus productif.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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C’est vrai qu’après 5 ou 6 heures de sommeil, me réveiller vers 4h du matin m’a aidé à me sentir lucide afin de prendre diverses bonnes décisions.
Aujourd’hui, en retraite, lors d’un réveil nocturne, je vais boire un peu d’eau et me recouche. Une bonne relaxation en comptant de 27 à 0 à chaque cycle inspiration, expiration et généralement je me rendors bien avant d’arriver à zéro.
Merci pour ces conseils rassurants. En effet je suis une toute petite dormeuse mais j’ai fini par accepter cette situation d’autant plus que je suis maintenant à la retraite. Je “gamberge” beaucoup la nuit mais de manière positive la plupart du temps ce qui m’aide bien à trouver des solutions en toute tranquillité pour la journée à venir. Je fais une sieste en début d’après-midi, habitude que j’ai prise depuis très longtemps pour pouvoir travailler le soir du temps où j’étais encore en activité et je m’accommode de tout cela au mieux. Ça évite bien du stress et m’équilibre dans… Lire la suite »
Comme cela fait du bien de lire cer article ! J’écris et mon moment le plus créatif se situe entre 4h et 6h du matin. Je mets ce temps à profit avec recueillement et reconnaissance. Je viens d’écrire mon dernier livre à ces heures là. Mon esprit est incroyablement lucide et sans doute bien branché sur mon inconscient…et à tous les 2 ils font du bon boulot. Un viticulteur biodynamique me disait que c’est l’heure où la terre inspire, lheure où les oiseaux de nuit se taisent et où ceux du jour ne chantent pas encore… Cela fait écho à… Lire la suite »
Je crois aussi que les horaires officiels, très éloignés de ceux de la nature, (au moins 2 heures) ne nous aident pas. Quand adoptera -t-on le méridien de Greenwitch, et arrêterons-nous les horaires d’été et d’hiver pour nous caler sur l’horaire qui est le plus proche de l’heure naturelle? Les économies d’énergie ne sont pas si importantes selon les études et on devrait pouvoir économiser de l’énergie en arrêtant d’éclairer toute la nuit les rues désertes grâce à des détecteurs de mouvement qui s’éteignent peu après. cet éclairage nocturne est nuisible à la biodiversité.
Se réveiller à 4H du matin n’est pas du tout une source d’angoisse. C’est l’heure de l’écriture et de l’esprit clair pour relire le travail de la veille avant de le valider. Quand je suis débordée, je me réveille naturellement à 4 H. Mes deux chats m’accompagnent dans les escaliers. La petite -Audace- se met sur mes genoux et le grand -Spazio- sur la table relit avec moi. Ce sont des moments de grande complicité avec nos amis les félins. Je travaille généralement 3 à 4 heures, si besoin maximum jusqu’à 11H, conseil d’ostéopathe: A 11h, on pique du nez.… Lire la suite »
Merci pour votre article très éclairant, le premier où j’apprends ce lien entre le réveil de 4h du matin et nos origines ancestrales. Ce lien prend tout son sens pour moi, merci pour cet éclairage.
Et moi aussi. Je fais miennes ces paroles. Merci, Mr Jean Marc Dupuis pour votre leçon, juste à l’heure necessaire!